La Fédération UNSA Territoriaux avait attiré l’attention du ministre de la Fonction Publique, par l’intermédiaire d’un parlementaire, sur la situation précaire des agents contractuels qui assurent momentanément le remplacement d’un fonctionnaire absent. Il s’agit d’un sujet de préoccupation nationale mais aussi locale et la réponse du ministre mérite d’être commentée.
Des contractuels de plus en plus nombreux
Près d’un quart des agents de la Fonction Publique Territoriale sont contractuels et le chiffre progresse fortement chaque année. Nous avons déjà attiré l’attention du gouvernement sur le fait que l’emploi contractuel ne peut être un mode de gestion de l’emploi public. Ce dispositif était destiné à assurer des remplacements sur des courtes durées, ce qui est de moins en moins vrai.
Ces agents rencontrent des difficultés pour s'insérer dans la vie sociale (droit au logement, droits sociaux reconnus aux fonctionnaires, etc...) en raison de la précarité de leur statut.
Des agents qui font l’objet d’une véritable discrimination
La Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) a été amenée à se prononcer sur la conformité au droit européen d’une réglementation nationale réservant le bénéfice d’un complément de rémunération à des agents publics employés en tant que fonctionnaires, à l'exclusion des agents employés en tant que contractuels de droit public à durée déterminée.
La Cour a jugé cette réglementation discriminatoire à l’égard des agents employés en CDD placés dans une situation comparable à celle des fonctionnaires. En effet, selon le juge européen, la situation juridique de l’agent (statutaire ou contractuelle) ne peut, sans raison objective, justifier l’exclusion des agents contractuels placés dans une situation comparable du bénéfice d’un complément de rémunération, dont le versement est lié à la seule ancienneté, s’ils remplissent les conditions objectives prévues pour son octroi.
L'employeur public fixe la rémunération brute à sa guise ?
Comme l’indique le Ministre dans sa réponse : « Le montant de la rémunération est fixé par l'autorité administrative, en prenant en compte, notamment, les fonctions occupées, la qualification requise pour leur exercice, la qualification détenue par l'agent ainsi que son expérience ».
Dans ces conditions, l'autorité administrative peut être conduite à fixer la rémunération d'un agent contractuel à un niveau supérieur ou inférieur à celui qu'il percevait dans un emploi précédent, qu'il soit public ou privé. L’absence de droits des agents contractuels en matière d’évolution de la rémunération brute est une source d’injustice.
Comme l’indique le Ministre : « elle n'implique pas la mise en œuvre d'un déroulement automatique de carrière à l'instar de celle existant pour les fonctionnaires ».
En clair, comme il n’existe pas d’accords négociés au niveau national sur la rémunération des contractuels, ni d’ailleurs de convention collective applicable (ce dispositif étant uniquement réservé aux salariés de droit privé), les contractuels ne disposent d’aucune source juridique pour s’y référer lors de la négociation de leur rémunération.
Une réévaluation au minimum triennale pourtant obligatoire !
S'il n'existe aucun principe général du droit imposant de faire bénéficier les agents non titulaires de règles équivalentes à celles applicables aux fonctionnaires, le Ministre indique que « cela ne signifie pas que la rémunération des agents contractuels ne progresse pas. Les conditions d'évolution de la rémunération de cette catégorie de personnel sont fixées par le décret n° 2016-1123 du 11 août 2016 pour la fonction publique territoriale ».
Donc, en application de ces dispositions réglementaires, la rémunération des agents contractuels doit être réévaluée au moins tous les trois ans, notamment au regard des résultats des entretiens professionnels ou de l'évolution des fonctions.
Il appartient à chaque employeur de prévoir les modalités de mise en œuvre de cette réévaluation, laquelle n'implique pas systématiquement une augmentation de la rémunération perçue par l'agent.
Cette augmentation ne doit ni être excessive – sous peine de constituer une modification substantielle justifiant un nouveau contrat – ni générer une progression automatique de la rémunération des agents contractuels sur une longue période...
Qui plus est, le Ministre est hostile au niveau national à toute « détermination de règles impératives concernant les revalorisations salariales des agents en contrat à durée indéterminée (CDI), calquées par exemple sur l'évolution indiciaire des agents titulaires, qui contribuerait à rigidifier le cadre de rémunération de ces agents en contradiction avec la souplesse de la relation contractuelle... »
Quelles solutions ?
Au plan national, la solution la plus rationnelle pour l’ UNSA Territoriaux serait de modifier la Loi pour permettre aux agents contractuels d’être rémunérés sur une échelle indiciaire prenant en compte l’ancienneté de l’emploi de référence du contrat.
Le maintien du dispositif national actuel constitue une discrimination, notamment pour les agents en CDI qui occupent par définition un emploi pérenne qui devrait être occupé par un agent titulaire.
Au plan local, l’UNSA Territoriaux propose d’interroger les autorités locales sur la mobilisation des Lignes Directrices de Gestion (LDG) pour déterminer les conditions et les critères de revalorisation salariale brute des agents contractuels. En s'appuyant, notamment, sur les résultats de leurs entretiens professionnels ou de leur évolution de fonctions, au moins tous les trois ans.
Les Lignes Directrices de Gestion qui font l’objet d’une négociation avec les employeurs et d’une consultation du Comité Social Territorial (CST), constituerait une garantie, dans leur rédaction, d’une évolution salariale des agents contractuels.
Les LDG peuvent en effet contenir des mesures communes à tous les agents, y compris les contractuels, pour fixer les conditions de réévaluation des contrats y compris sur la durée, qui peut être inférieure à trois ans :
Sur le site internet du "portail de la fonction publique", il est indiqué que : « Les lignes directrices de gestion concernent les fonctionnaires mais sont également susceptibles de s’appliquer aux agents contractuels ».
Aussi, le guide de l’Association des Maires de France (AMF) indique des éléments à propos de l’utilisation des LDG et de « La politique salariale des contractuels ».
Cette formalisation inscrite dans les LDG, au niveau local, pourrait permettre une évolution salariale d’un agent contractuel, dans l’attente d’une révision statutaire sur ce sujet.
Comentários